TRADUCTION

mercredi 9 mai 2012

MATANDA/ REP DEM DU CONGO


L’insécurité refait surface au Nord-Kivu :
Les Carmélites Missionnaires Thérésiennes de Matanda réfugiées à Goma

Soeur Irène de la PAIX

On se rappelle encore : C’était le 29 décembre 2011, à la clôture du bicentenaire de notre Père Fondateur, le bienheureux Francisco Palau, que la Sœur Beata, notre provinciale, avait annoncé le retour des carmélites missionnaires thérésienne à la mission de Matanda, après 15 ans d’absence causée principalement par les guerres à répétition dans cette partie du Nord Kivu. Contre toute attente, les sœurs sont obligées momentanément de plier bagage un mois seulement après leur installation  à Matanda. Les mêmes causes ont reproduit les mêmes effets : de nouveau l’insécurité est au rendez-vous. Qui l’eût cru ?

Le retour des carmélites missionnaires thérésiennes à Matanda a été obtenu après beaucoup de tractations avec l’évêque du lieu et la demande répétée de la population du village de Matanda. Après avoir étudié et approfondi cette demande, notre maison généralice a donné son aval pour ce retour car disait-on la pacification du pays est chose faite et toute les assurances nous étaient données.
La nouvelle communauté constituée de quatre sœurs a été installée officiellement en la solennité de Saint Joseph, le 19 mars 2012. 
Déjà, les quelques projets étaient en cours de réalisation : réfection des bâtiments du couvent longtemps abandonnés et la réhabilitation du dispensaire.

Un mois seulement après les débuts des travaux, l’insécurité a encore refait surface. Et pour cause : La haute cour militaire congolaise serait à la recherche d’un général poursuivi par la cour pénale internationale pour crime de guerre et crime contre l’humanité. Le présumé général coupable serait, selon les dires, retranché dans le village de Mushaki, à quelques kilomètres de Matanda.
A l’heure actuelle, c’est la panique générale et totale qui sévit dans ce coin de la province du Nord-Kivu. Un afflux de la population fuyant les combats est signalé vers la ville Goma et de ses environs.
Le salut des religieuses carmélites missionnaires thérésienne s’est trouvé dans le retrait stratégique vers Goma, abandonnant sans le vouloir la population qui les avait pourtant accueillies à cœur ouvert.
Comme Saint Joseph, patron de leur communauté, elles ont quitté précipitamment Matanda, avec le strict nécessaire, pour trouver refuge dans la communauté Marie, Mère de l’Eglise. 

Ces événements se passent une semaine seulement après que cette communauté ait reçu la visite des sœurs vicaire générale et de l’économe générale, visite que les avait réconforté à poursuivre l’œuvre missionnaire à Matanda.

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Récit des événements
Arrivées à Goma vers 17 heures 30 locales  de ce dimanche 29 avril 2012, les sœurs sont visiblement traumatisées, stressées, terrorisées, craintives et toutes  tremblantes. Elles ont rassemblé leurs forces  pour raconter ce qu’elles ont vu et entendu dans ce récit :
 Tout a commencé le vendredi 20 avril avec l’affrontement armé à Rubaya. Dans la même semaine, l'insécurité régnait Déjà à Masisi. Le  lundi 23 avril, on entendait des détonations d’armes lourdes et légères qui signalaient les affrontements entre les combattants fidèles au général recherché par la haute cour militaire congolaise et les militaires de l’armée régulière à Rubaya et Bihambwe, deux villages voisins de Matanda où nous travaillons comme missionnaires.
Premier signe avant coureur : un afflux des refugiés venant de Nyakajanga s'entassent à la paroisse de Matanda.
Au cours de ces affrontements, on nous a rapporté un bilan provisoire de quatre militaires tués du côté des insurgés et de deux de l’armée régulière. On note aussi plusieurs violences sexuelles et  agressions sans oublier le pillage systématique de la fromagerie d’Osso. 

Le dimanche 29 avril, les combattants fidèles au général poursuivi ont finalement pris le dessus en occupant le village de Mushaki, à une heure de notre couvent. La population commençait déjà à quitter l’endroit pour se diriger vers Sake et Goma.
Plusieurs personnes nous ont conseillé  de quitter Matanda mais nous  n'arrivions pas à nous décider parce que les prêtres de la paroisse étaient tranquilles et nous disaient qu'il n'y avait rien de grave. Entre-temps, notre chauffeur était introuvable. Nous avons fait appel  au commandant de la police de Matanda pour nous aider à trouver un chauffeur. Dieu merci,  un chauffeur volontaire s’est présenté et nous a  amené jusqu'à Goma où nous sommes arrivées à 17h30.
Après notre sortie, il n'était plus possible de passer à Mushaki car la route était barricadée et vers 19h00, il était difficile de joindre les prêtres de la Paroisse de Matanda. Jusqu'à 18h, on communiquait difficilement avec Matanda, le réseau téléphonique était pratiquement brouillé.

En nous voyant partir vers Goma, indépendamment de notre très bonne volonté, la population de Matanda n'a pas caché sa désolation. Les larmes aux yeux, les bras et les yeux levés au ciel, la population qui nous avait accueillies il y a un mois, criait de toutes ses forces : " qu'avons-nous fait pour être ainsi maudit? Comme les sœurs quittent la paroisse, donc c'est sérieux. C'est sûr qu'elles ne reviendront plus, qu'allons nous devenir? Nous savons ce qui nous attend...que le Seigneur aie  pitié de nous...la présence des sœurs nous réconfortait déjà et nous redonnait beaucoup d'espoir..."
Tous ces cris de détresses résonnent encore dans nos cœurs et nos oreilles, mais nous étions obligées de replier stratégiquement vers Goma par la force des événements. Le lendemain était incertain. La malheureuse expérience d’il y a 15 ans est vite revenue.
Depuis Goma, nous suivons l’évolution des événements et plus particulièrement la situation de notre chère mission de Matanda. Nous prions Marie, Notre Dame de la Paix pour nos frères et sœurs qui sont restés dans cette « zone rouge » et nous prions instamment les autorités du pays de faire tout ce qui est à leur pouvoir pour pacifier ce coin du pays qui ne mérite pas ce calvaire.

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