Où va-t-on
passer la fête de Noël ? Où va-t-on passer le réveillon de la nouvelle
année ? Ce sont là les deux questions que se sont posées nombre
d’habitants de la Planète Terre, à l’approche des fêtes de Noël et de fin
d’année. Ces deux fêtes passées, mais pas les inquiétudes. La sœur Delphine
jette un regard en arrière. Elle se questionne et nous fait par de ce qu’elle a
vécu quelque part … dans le camp des déplacés à Goma.
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La Noël est passée … la fête de
la Saint Sylvestre aussi. Comment a t- on passé ces deux
fêtes ? Les uns ont passé ces réveillons à l’église, en
veillant et en priant pour rendre grâce à Dieu pour ses bienfaits. Les autres
les ont passées en s’ennuyant à la maison, dans la « méditation »,
car ils sont frappés par la fameuse « crise financière ». La plainte
est connue : On ne vend pas parce que l’on n’achète pas. On achète pas
parce qu’on n’a pas d’argent. La boucle est bouclée. D’autres enfin, ont choisi
de passer ces fêtes de Noël et de fin d’année dans des boites de nuit,
mangeant, buvant, dansant, bref s’amusant pour oublier pour un temps tous
les soucis de la vie. Je ne porte pas de jugement sur les choix des uns et des
autres mais je me questionne.
« Plus
de 800.000 déplacés…
entre
l’espoir et l’incertitude »
Mais combien parmi nos
compatriotes congolais ont pensé, un seul instant, que plus de 800.000
âmes à l’Est de la RDC ont passé les fêtes de Noël et de fin d’année
2012 dans les camps des déplacés ? Quand j’ai réfléchi à cette question,
ma salive est devenue amère dans ma bouche. Je n’avais pas le temps d’aller
voir comment on a embellit la Ville de Goma avec les guirlandes et autres arbres
de sapins pour cacher les stigmates de la récente guerre. Les feux d’artifices
et jeux de lumière ne m’intéressaient guère. J’ai voulu voir la situation de
mes frères et sœurs les déplacés de la énième guerre de Goma en face, sans
fausse honte et sans détours. C’est là que j’ai découvert le visage
misérabiliste qu’engendrent les conflits armés.
Nos frères et sœurs vivent dans
la situation de « NI PAIX, NI GUERRE » : la pire de situation
qui puisse exister pour une personne humaine. Ici, on ne sait pas sur quel pied
danser. Ici, on vit entre L’ESPOIR et L’INCERTITUDE. On vit sans aucune
assistance. On vivote : On construit soi-même son abri avec les matériaux
de fortune qu’on a sous la main. On fait ce qu’on peut et comme on peut. Le
confort est loin d’être un objectif du constructeur. Trouver un endroit pour
s’abriter contre les intempéries, c’est le seul souci. Je vous épargne de leur
souci d’eau et de la nourriture. Un abri provisoire en attendant la prochaine
fuite.
Fuite-arrêt-fuite. C’est le cycle
des déplacés. Ici, on vit dans le qui-vive. Ici, on est « simple
comme la colombe et prudent comme un serpent ». Comment dans cette
perspective entendre le cri de Noël du prophète Isaïe : « Un
enfant nous est né, un fils nous est donné, l’insigne du pouvoir est sur son
épaule. On proclame son nom : ‘Merveilleux-Conseiller ;
Dieu-Fort ; Père-à-jamais ; Prince de la PAIX’ ».
Un
enfant nous est né…
J’ai vu la misère des enfants
dans les camps de déplacés : marasme et kwashiorkor battent leur
plein. Un Enfant nous est né. Quel enfant ? Enfant déshydraté,
diarrhéique, affamé, fatigué et sans force pour chasser même une seule mouche
qui suce sa plaie en la rendant plus profonde encore. Ces
enfants-là, je les ai vus. Dans mon impuissance, j’ai tenté de leur redonner un
sourire de Noël. Je leur ai donné une paix sans pain … Est-ce là l’image de
l’Enfant qui nous est né, de ce Fils qui nous est donné ?
C’est
le Prince de la PAIX ...
Quelle Paix ? Cela fait une
quinzaine d’années que l’on recherche cette paix sans jamais la trouver. Chaque
trois ans, on doit courir : 2003, 2006, 2009, 2012 … la population ne fait
que courir dans tous les sens. A quand la fin de ce marathon sans fin? Les
rebelles prennent les armes, les civils sont obligés de
courir, même s’ils ne savent pas vraiment pour quoi ils doivent
courir. Au bout du compte, on donne à ceux qui ont pris des armes des cadeaux,
des ministères dans le gouvernement et des grades. Et par-dessus tout :
oubli leurs crimes contre l’humanité… tout cela, au nom de la Paix. Mais quelle
Paix ? On avait la ferme espérance que ceux qui étaient partis
en pourparlers à Kampala, allaient s’enfermer là-bas, travailler sérieusement,
discuter, dialoguer, éviter tout sommeil à leurs yeux et tout répit à leurs
paupières avant d’avoir trouver la solution au problème des accords entre la
rébellion et le gouvernement, voilà qu’ils ont rouvert la porte et chacun est
rentré chez lui pour « fêter » d’abord et ensuite seulement, ils
reprendront avec les discussions après avoir bien mangé, dansé et bu.
Quelle paix attendre de toutes ces rencontres ? Mon scepticisme augmente
au jour le jour.
Limites
et faiblesses du mandat des forces des Nations Unies en RD Congo
Les forces des Nations Unies
sensées maintenir la PAIX à Goma, ont montré leurs limites et leurs faiblesses
avec leur mandat qui ne leur permettent pas d’intervenir pour imposer la PAIX.
Elles sont réduites à une force d’observation SEULEMENT. On observe, on compte
le nombre des morts, des blessés et des violés. On établit une très longue
liste macabre et on fait le rapport à qui de droit. Ce que ces forces trouvent
mieux à faire, c’est de prendre les jumelles et de regarder de loin la misère
qui se passe dans les camps de déplacés sans intervenir. Ainsi s’accompli le
proverbe africain qui dit : « La souffrance de l’autre se trouve
au-delà de la rivière »
Pour me défouler, je finis cette
réflexion par un chant de Noël composé par Berthet N. Ce chant m’interpelle
car il contient des questionnements mais aussi des
réponses qui nous invitent à exorciser l’indifférence face à la misère de
l’autre. En fait, dans son hymne, l’auteur compositeur brûle d’envie de savoir
l’endroit, le jour et pourquoi le Christ est né ? Ma réponse, je l’ai
trouvée dans les camps des déplacés où la population attend que nous ouvrions
nos cœurs et nos mains pour leur venir en aide !
Qui peut me dire l’endroit où le
Christ est né ?
Vois, Jésus prend naissance où l’homme commence d’ouvrir son cœur et
ses mains
pour changer la vie de ses frères, oui, là, Jésus prends naissance.
Qui peut me dire le jour où Jésus
le Christ est né ?
Vois, Jésus prend naissance quand l’homme commence d’ouvrir son
cœur et ses mains
pour changer la vie de ses frères ; alors, Jésus prend naissance.
Qui peut me dire pourquoi Jésus
le Seigneur est né ?
Vois, Jésus prend naissance pour toi qui commences d’ouvrir ton cœur et
tes mains
pour changer la vie de tes frères ; pour toi, Jésus prend
naissance.
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